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Bon retour sur scène, Monsieur Abittan

Hier soir, samedi 5 avril 2025, je suis allé voir Ary Abittan. Non pas l’humoriste – que je ne connaissais que de nom – mais bien le comédien. Celui du film Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu de Philippe de Chauveron, avec Christian Clavier et Chantal Lauby. Je ne savais pas à quoi m’attendre. Un spectacle drôle ? Un retour fade ? Un humoriste en quête de rédemption ?

Ary Abittan
Ary Abittan

Ary Abittan signe son retour sur scène après trois années de démêlés avec la justice. En 2021, il avait été visé par une plainte pour viol. Aujourd’hui, la cour d’appel de Paris a confirmé le non-lieu. La justice a tranché. Et pourtant, dans une époque où les réseaux sociaux jugent avant même que la justice ait le temps d’enquêter, on continue d’assimiler une accusation à une condamnation. L’homme, son identité, son art, tout est remis en question par des regards qui ne savent que condamner.


Je suis, et je resterai, un défenseur des droits humains. De tous les humains. Je dénonce chaque forme d’abus, de violence, d'injustice. Mais je m’élève aussi contre ces procès publics où l’on oublie que la présomption d’innocence est un droit fondamental, pas une faveur. Ce n’est pas un concept désuet qu’on invoque quand ça nous arrange. C’est un pilier.


Avec un humour teinté d’autodérision, une sincérité presque désarmante, Ary Abittan revient sur ces trois années d’épreuves. Il ne cherche pas à se justifier. Il raconte. Il rit de lui-même, mais sans se trahir. Il transforme la douleur en art. Et ça, c’est ce qui fait toute la différence. Parce que oui, faire rire est un art. Mais rire de soi, et le faire avec grâce, relève du courage.


Et si l’on veut comprendre la portée de ce retour, il faut aussi parler de ce qui l’a précédé. De Vincent Duvergé, en première partie. Une performance qui nous a rappelé l’époque de Monsieur Moustache. Une époque où l’humour servait aussi à dire ce qu’on n’ose pas affronter. Où l’on évoquait des erreurs judiciaires, des vies brisées sur des soupçons, des tragédies évitables. Car oui, il faut se souvenir que des innocents ont été emprisonnés, salis, ou tués. Juste sur des rumeurs.



Ce que dit Ary Abittan, c’est que cela peut arriver à tout le monde. Et il a raison. Il suffit d’une mauvaise passe, d’un mauvais timing, d’un mauvais récit. Et la foule vous tourne le dos. Le même public qu’on veut faire rire, émouvoir, toucher. Celui pour qui on se donne corps et âme. Celui-là même devient tribunal.


Mais quand tout semble vous échapper, quand le monde vous pousse au plus bas, que fait-on ? On se relève. On se fait "riech", comme il le dit avec un accent presque tendre. On prend un train, même imaginaire, et on repart. Parce qu’on est artiste. Parce qu’on a l’art. Et l’art, lui, ne juge pas. Ce spectacle, pour Ary Abittan, a été un exutoire. Une thérapie à voix haute. Une manière de recoller les morceaux. Ce que Galimatias a été pour moi. Peut-être que certains ne comprendront jamais pourquoi on ressent le besoin d’exorciser la douleur par la parole, par la scène ou par l’écriture. Mais ce n’est pas pour eux qu’on le fait. C’est pour nous. Pour survivre. Pour respirer à nouveau. Pour marcher, droit dans nos souliers.


Contrairement à lui, je vis dans l’ombre. Dans cette zone grise qu’il appelle "Black Friday". Loin des projecteurs. Et pourtant, son message m’a parlé. Il m’a touché. Profondément. Au début, j’étais sceptique. Un humoriste français de plus ? Encore un monologue parisien hors-sol ? Encore un incident à la Jérémy Crédeville et ses propos maladroits sur les Mauriciens ? Eh bien non. J’ai été surpris. Agréablement. Par la simplicité. Par l’humilité. Par l’émotion. Deux heures suspendues entre rires et confidences.


Alors oui, bon retour sur scène, Monsieur Abittan. Et merci.

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